Rilke, Chant d'amour
Comment tenir mon âme
afin qu'elle ne frôle pas la tienne ?
Comment la porter par-dessus Toi
vers d'autres choses ?
J'aimerais la cacher
près d'un objet perdu dans le noir,
en un lieu étrange et calme,
qui ne résonne pas quand
tes profondeurs tressaillent.
Et cependant tout ce qui nous touche
nous fond l'un dans l'autre comme l'archet
qui de deux cordes tire un son unique :
sur quel instrument sommes-nous couchés
et quelle est la main qui nous tient ?
O douce chanson.
Rainer Maria Rilke, "Chant d'amour", in Nouveaux poèmes, Seuil, 1972, p.166.